L’Espagne depuis Hendaye avec le Topo

Il existe en face de la gare d’Hendaye un arrêt du réseau de RER basque, Euskotren. Ce train/métro est surnommé le Topo en raison de sa forme et de son trajet comportant de nombreux tunnels. La liaison reste assez méconnue même si elle est rapidement prise d’assaut en haute saison. Performante et bon marché, elle permet depuis Hendaye d’aller à la plage et de manger des pintxos à San Sebastian (Saint Sébastien) et même de cheminer jusqu’à Bilbao…

Arrivée à Hendaye, ville frontalière

Vue sur l’Océan Atlantique depuis le TGV INOUI Paris > Hendaye, vers St Jean de Luz. Côté droit dans le sens de la marche.

Hendaye est le terminus de plusieurs liaisons ferroviaires. On s’y rend :

  • Depuis Paris, en TGV direct au départ de la Gare Montparnasse, ou train de nuit depuis Austerlitz certains jours.
  • Depuis Bordeaux, TGV ou TER direct.
  • Depuis le sud (Toulouse, Montpellier…) : possible de prendre un Intercités de Toulouse à Bayonne puis un TGV/TER jusqu’à Hendaye.

Nous arrivons à la frontière avec le pays basque espagnol, au coeur d’un axe routier important voyant passer de nombreux camions de marchandises. Côté ferroviaire, le trafic est moindre avec une délimitation plus marquée. Trois modes d’écartement des rails, c’est à dire la distance entre les deux rails d’un côté à l’autre de la traverse, cohabitent dans la région.

  • L’écartement ibérique (1,668 mètres), utilisé par les trains classiques en Espagne et au Portugal. Certains trains locaux partent de la gare d’Irun, de l’autre côté de la frontière. A noter que les LGV espagnoles utilisent elles l’écartement normal.
  • L’écartement normal (1,435 mètres), utilisé par les TGV/TER français qui s’arrêtent à Hendaye, et de manière générale standard en Europe de l’Ouest.
  • L’écartement métrique (1 mètre) de la ligne du Topo, à part.

Ces écartements sont difficilement interopérables, les matériels ferroviaires étant conçus pour une configuration spécifique. Aujourd’hui, seul le Topo et son réseau métrique assure une liaison transfrontalière de bout en bout entre Hendaye et l’Espagne, bien que les gares d’Irun et d’Hendaye comportent des voies avec les deux écartements, permettant d’accueillir les matériels ferroviaires des différents pays.

Justement, il existait jusqu’en 2017, une liaison internationale avec un TGV Paris <> Irun, laquelle a été supprimée pour des contraintes d’exploitation (notamment l’engagement du gabarit sous un pont à Irun engendré par l’introduction de rames TGV/TER à deux niveaux, ainsi que la réglementation qui impose au matériel d’être homologué et aux conducteurs de parler espagnol pour parcourir les quelques kilomètres sur le réseau ferré ibérique).

La gare d’Irun semble maintenant surdimensionnée. Seul un train régional est à quai.

Même chose pour les trains ibériques, le Trenhotel 313 (Sud Expresso) de nuit qui allait de Hendaye à Lisbonne n’a pas roulé côté français depuis le COVID.

Départ du Topo à Hendaye

Le Topo, avec son enclave en France, est donc le seul à pouvoir nous emmener en Espagne, au rythme d’un départ cadencé toutes les demi-heures. Sa station est située juste en face de la gare de Hendaye, à droite lorsqu’on en sort. Les billets doivent être achetés sur place, sur le distributeur situé en gare de Hendaye ou dans le hall de la station.

Pour anticiper son trajet, une application mobile (Euskotren) ou le site internet d’euskotren permettent de calculer les itinéraires et consulter les horaires.

En pénétrant dans le hall rénové en 2020 et en apercevant le petit train qui vient y effectuer un rebroussement, on pourrait croire qu’on embarque sur un réseau touristique. En réalité, Hendaye est le terminus de l’une des cinq lignes du réseau public basque, s’étendant sur près de 200 kilomètres de voies.

S’il fallait schématiser comme ci-dessus le réseau Euskotren, on pourrait dire qu’il est articulé autour de deux agglomérations desservies par leurs lignes urbaines respectives (la E2 et la E5 pour San Sebastian, la E3 et la E4 pour Bilbao). Et la ligne E1, à vocation plus régionale, vient relier ces deux réseaux pour n’en faire qu’un.

Au départ de Hendaye, il est donc possible :

  • De traverser la frontière pour Irun : 4min vers la station Irun Colon pour 1,85€
  • De filer à San Sebastian : 36min vers la station Amara-Donostia pour 2,75€
  • Pour aller encore plus loin, une fois à San Sebastian, on peut changer pour la ligne E1 et prolonger son parcours jusqu’à Bilbao en 2h30 pour 6,50€

Sur le trajet vers San Sebastian : Irun, les ports d’Hondarribia et de Pasaia

Toutes les demi-heures de 5h33 à 22h33, un Topo part donc de Hendaye pour traverser l’un des quatre ponts sur la Bidassoa après être arrivé en France seulement 10 minutes auparavant. La première ville immédiatement desservie est Irun, pile de l’autre côté de la frontière. Il est possible de descendre à la station Irun Colon pour arriver dans le centre-ville et profiter de l’Espagne à 4min de trajet en train.

Une rame s’apprête à partir d’Irun Colon vers San Sebastian.

Depuis Irun, un bus peut vous emmener jusqu’à Hondarribia en passant la zone aéroportuaire. Il s’agit d’un port avec de nombreux restaurants, bars, et la plage. Un bateau fait la navette jusqu’à Hendaye, de l’autre côté de la rive, lorsque la marée le permet.

Entre Irun et San Sebastian, le topo est doublé par un train Cercanias de la Renfe.

À partir d’Irun, la liaison de la ligne E2 vers San Sebastian est désormais cadencée au quart d’heure. Elle est aussi doublée en parallèle par le réseau régional Cercanias et Intercity, au départ de la gare classique d’Irun, assurant au-delà de San Sebastian une desserte notamment vers d’autres villes de la région et Madrid avec une fréquence de départs nettement plus maigre (environ un train par heure au départ de la gare d’Irun).

La station Herrera

Sur son parcours, le Topo s’arrête à une station toutes les 2 minutes. Fidèle à son nom, il s’enterre dans des tunnels à mesure qu’il approche de San Sebastian. Les stations sont modernes et très bien entretenues, elles disposent toutes de distributeurs de tickets et d’écrans d’information voyageurs en direct.

Une halte à Pasaia ou Herrera permet de se rendre au petit port de Pasaia. Son embouchure est traversée par une barque qu’empruntent les pèlerins de Compostelle, sur l’une des premières étapes du Camino Norte reliant Irun à San Sebastian. Il est en effet possible de relier Irun / Hondarribia à Pasaia puis San Sebastian en une grosse journée de marche sur de jolis sentiers qui longent l’océan. Une alternative peut être de commencer ou finir sa marche à Pasaia pour ne pas tout faire d’une traite. L’arrivée sur San Sebastian se fait depuis les hauteurs et offre de beaux points de vue, ce qui a autant voire plus de panache que l’arrivée en train.

San Sebastian (Amara Donostia)

Au bout de 36 minutes de train direct depuis Hendaye, on arrive à San Sebastian. La gare d’Amara-Donostia est en butoir, les trains y rebroussent donc systématiquement pour effectuer leur desserte.

Depuis la gare, on se trouve à une dizaine de minutes à pied de la plage de la Concha, et à une vingtaine de minutes de la vieille ville où se trouvent les bars et restaurants. On peut notamment profiter des pintxos, ces tapas basques composées principalement de petites bouchées avec une garniture sur un morceau de pain, à déguster avec une sangria.

La ville est très agréable, avec deux grandes plages reliées par une balade en bord de mer, la rivière Urumea qui se mélange à l’océan, de nombreuses boutiques et restaurants.

San Sebastian est ainsi depuis Hendaye la meilleure destination en termes de rapport dépaysement / temps de trajet. Attention toutefois à ne pas manquer le dernier Topo vers 22h30, le trajet en taxi ou la nuit d’hôtel dans cette station balnéaire pouvant s’avérer être une moins bonne affaire que le billet aller/retour à 5,10€.

Bilbao

L’existence de la ligne E1 qui relie cette fois-ci San Sebastian à Bilbao est presque une invitation à pousser l’expérience jusqu’au bout, bien que le temps de trajet depuis Hendaye ne soit plus du tout le même : en plus des 36min pour se rendre à San Sebastian, le temps de correspondance, il faudra rajouter 2h30 pour se rendre à Bilbao. A ce rythme vous avez presque le temps de remonter sur Paris (4h40 grâce au TGV).

“Petit déjeuner” au buffet de la gare d’Amara-Donostia. Pas les meilleurs pintxos de la ville mais appréciable !

À Amara Donostia, le départ de la ligne E1 est cadencé à 50 toutes les heures (de 5h50 à 19h50).

Depuis Hendaye, les départs à h33 (ex: 6h33) vous font donc arriver à San Sebastian à h10 (7h10) pour un départ à h50 (7h50). Les départs à h03 (7h03) vous font quant à eux arriver à h40 (7h40) soit 10min de correspondance, qui suffisent à changer de train. Si vous prenez le temps de correspondance plus large, vous avez le temps de manger dans l’une des boulangeries / cafés en face de la gare, ou au buffet de celle-ci. Vous aurez sans doute besoin de faire quelques réserves pour ce long trajet en RER dont les voitures ne sont évidemment pas équipées de voiture bar.

Le matériel qui assure cette longue liaison est quasi identique à celui des autres lignes, à l’exception de toilettes accessibles disponibles dans l’une des voitures. En termes de confort à bord, on retrouve donc majoritairement des carrés de sièges non rembourrés comme dans un métro/RER.

Bien que long, le trajet ne semble pour autant pas forcément interminable, il comporte des arrêts réguliers (mais pas d’arrêt prolongé malgré deux changements de conducteurs), et une diversité de paysages. Près de San Sebastian et Bilbao, le train effectue son parcours principalement sous terre. Entre les deux, on aperçoit l’océan entre les montages, puisque la ligne longe les côtes de San Sebastian à la gare de Deba. Ensuite, elle s’enfonce dans les terres. Le trajet alterne entre des portions en voie unique au milieu de la forêt, et la desserte de villes éparses où s’effectuent les croisements des rames qui vont dans le sens inverse.

En arrivant à Bilbao, on peut descendre du train à la station Zazpikaleak – Casco Viejo, proche du centre-ville et bien desservie puisqu’en correspondance avec le métro, et le tramway (lui aussi opéré par Euskotren).

Avec la station Casco Viejo, on arrive pas loin de la superbe gare de Bilbao, avec son vitrail remarquable.

Ce train Alvia pour Barcelone roule au départ de Bilbao sur une ligne à écartement Ibérique. Mais à partir de Saragosse, il empruntera la LGV à écartement standard. L’astuce ? Il franchira une station en ligne (“cambiador”) sans s’arrêter qui réduira en quelques minutes l’écartement de ses bogies (1,668m vers 1,435m). Les passagers, qui pour la plupart n’auront pas conscience de ce changement, pourront continuer leur parcours sans changer de rame.

En une journée à Bilbao, il est possible de faire un tour au musée Guggenheim, et de monter sur le funiculaire non loin de là. D’autres lignes Euskotren permettent encore d’explorer la région au départ de Bilbao.

En synthèse

A tester donc, cette liaison cadencée et performante proposée par Euskotren, que l’on peut prendre au départ de Hendaye pour se rendre principalement à San Sebastian mais également vers des destinations plus proches (Irun, Pasaia…) comme dans le reste de la région jusqu’à Bilbao. Ce service bien installé (le Topo à Hendaye a fêté ses 100 ans en 2013) connaît encore des projets de développement, comme le remplacement de la station Amara-Donostia en butoir par des stations souterraines à San Sebastian, ou encore le prolongement d’une ligne vers l’aéroport de San Sebastian et Hondarribia. À Irun, une nouvelle gare TGV (“Via Irun”) est en projet.

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